Bonjour, ravie de vous retrouver pour ce rendez-vous du dimanche : premières lignes, créé par Ma Lecturothèque. Cela permet ainsi de se faire une idée sur le livre que nous allons lire voire même de faire une belle découverte. Nous aimons beaucoup le principe.
Le concept est simple, chaque dimanche, il faut choisir un livre et en citer les premières lignes.
Le choix de EMY :

Feuilleplume est vent. Feuilleplume est mouvante, volante, courant d’air. Chapardeuse, aussi. Feuilleplume ne rend pas tout ce qu’elle absorbe. Parfois oui, parfois non. Des pages entières, des coins de bouquins grignotés dans la marge, jusqu’aux premières lettres savoureuses. Feuilleplume a faim de ces caractères d’impression. Caractérielle… je suis… Feuilleplume !
Mes deux humains ne m’en veulent pas, ils ont compris mon appétit. Jamais rassasiée, Feuilleplume. Plus fort qu’elle. Manger des mots, des lettres, boulotter des textes, pour les recracher sous forme nouvelle. Là un sonnet, ici un plan, une trame ou un personnage dans ses moindres détails. La création brute. Jamais à partir de rien, mais toujours feuillement original ! Elle leur coûte cher en livres, l’animale, mais c’est un moindre mal pour me garder auprès d’eux. Si les pages viennent à manquer, ils savent que je migrerai. Volage, aussi, la Feuilleplume. Pour le moment, pas de raisons. Ce cocon-ci, anonyme espace de création noyé dans les méandres de la ville, regorge de recoins et d’ouvertures, de mots vieux et de voix solides. Tellement de pensées dissonantes, de choix et d’itinéraires, de passions, de gloire et d’avenir. Tout est là, à portée de truffe : d’infinies possibilités de sons, d’images et de couleurs. Tellement de choses ont été dites, écrites. Feuilleplume les digère, son corps entier comme un gros estomac de neurones littéraires, ses plumes changeant la forme de leur tissage et leur teinte selon l’agencement des lettres. Le ton, l’ambiance, le rythme et l’histoire structurent mes traits.
Feuilleplume est volatile fiction, errant de forme en forme, habitant l’étagère du salon, le carton du grenier ou les pots à épices de la cuisine. Entre les lattes du sommier je me divise, chatouillée par les rebondissements lascifs de mes humains, absorbant chacun des mots qu’ils s’échangent, et même ces sons plus informels que j’interprète sans vraiment comprendre. À la tapisserie je m’intègre, fresque murale pour les invités, secret terrible pour le duo qui habite ici. Il a fallu des années pour comprendre les règles, la notion de sécurité et la bienveillance de mes humains. Nous nous protégeons mutuellement. Ils me nourrissent, je leur offre l’objet de mes digestions. Avec d’autres animaux domestiques, cette entente serait tout bonnement répugnante. Pas avec Feuilleplume. Mes humains, eux, se jettent avidement sur mes productions, impatients d’en découvrir le sens et la substance. Nous nous sommes trouvés. Mon intuition me souffle que je n’ai pas atterri ici par hasard. Peu importe, j’y suis.